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Les paradoxes de l'abondance

Chef d’escadron Frйdйric Boudier

(gendarmerie nationale, France, 14e promotion du CID)

A l’heure oщ l’eau potable est de plus en plus considйrйe comme une ressource rare de valeur stratйgique, le Brйsil possиde, avec environ 12% des rйserves de la planиte, un avantage considйrable. Pourtant, s’en tenir а ce seul constat serait mйconnaоtre les difficultйs rencontrйes par ce pays dans le domaine de la gestion de l’eau. En effet, inйgalement rйpartie sur le territoire, la ressource hydrique est l’objet de convoitise et se trouve en outre menacйe par l’action de l’homme qui, s’inscrivant dans un cercle vicieux, devient lui-mкme victime de sa nйgligence. Conscient des enjeux pour sa population et son йconomie, le Brйsil accentue ses efforts pour amйliorer cette situation en usant de diffйrents leviers, tels que des projets d’infrastructures, une rйglementation plus pragmatique et une approche rйnovйe de la gestion de la ressource.

Ce mйmoire de gйopolitique a йtй rйdigй au Collиge Interarmйes de Dйfense, dans le cadre du sйminaire « Gйopolitique de l’eau » dirigй par Barah Mikaпl (IRIS).

Bibliographie de l'йtude et biographie de l'auteur en bas de page.

Mots clйs - Key words: frйdйric boudier, collиge interarmйes de dйfense, cid, paris, l'eau au brйsil, les paradoxes de l'abondance, gйopolitique de l'eau, barah mikaпl, b rйsil, eau, hydrique, ressources, rйserves, pollution, gestion.

PREMIИRE PARTIE. UNE FORMIDABLE RICHESSE HYDRIQUE.

Donnйes gйnйrales. L’Amazone. un gйant mondial. D’importants enjeux йconomiques et humains.

DEUXIИME PARTIE. PARADOXALEMENT D’IMPORTANTES FAIBLESSES.

Une mauvaise rйpartition de la ressources. Une forte interaction homme/eau porteuse de menaces. L’eau source de luttes et de convoitise.

TROISIИME PARTIE. PROJETS ET PERSPECTIVES.

D’ambitieux projets pour valoriser la ressource hydrique. Un cadre lйgal renforcй. Le bassin versant. nouvelle йchelle de gestion des eaux au Brйsil.

D ANS LA GEOPOLITIQUE MONDIALE, les pйriodes se suivent et ne se ressemblent pas. Les rapports interйtatiques et, de plus en plus, transйtatiques s’articulent ainsi successivement autour de certaines ressources jugйes vitales ou, a minima. de portйe stratйgique. Celles-ci constituent autant de piliers de la puissance relative, de l’indйpendance ou de l’existence pure et simple d’un pays. Les exemples en ce domaine sont nombreux et, parmi les plus emblйmatiques et les plus rйcents historiquement, on peut йvoquer le charbon, l’acier, le gaz naturel ou, bien entendu, le pйtrole. Mais les choses йvoluent et certaines ressources prennent ou reprennent de la valeur au « hit parade » des enjeux stratйgiques. C’est notamment le cas de l’eau, souvent йvoquйe comme « l’or bleu ». Car, si l’humanitй ne manque pas d’eau, il est maintenant йtabli qu’elle manque d’eau potable. Avec 1/5 иme de sa population qui n’a pas accиs а l’eau potable, la planиte est notamment victime du gaspillage liй а une irrigation dispendieuse et de la souillure de la ressource par des rejets agricoles et urbains insuffisamment contrфlйs. Et la situation ne semble pas en voie de s’amйliorer. D’une part, le rйchauffement mondial menace de bouleverser le rйgime des pluies et de crйer les conditions de sйcheresses plus frйquentes et plus rйpandues. D’autre part, la croissance de la population mondiale et son corollaire de concentration urbaine sont de nature а accentuer tant la pollution que les besoins. Ainsi, en prospective, ce sont quatre milliards de citadins supplйmentaires qu’il faudra alimenter en eau potable dans quarante ans. Mais tous les pays ne sont pas logйs а la mкme enseigne. Le Brйsil, avec 12% des rйserves estimйes, apparaоt particuliиrement а l’abri du besoin et а la tкte d’un capital inйpuisable. Il n’en est rien et c’est la tout le paradoxe et l’intйrкt du cas brйsilien.

En effet, le Brйsil s’est largement appuyй pour son dйveloppement sur l’atout constituй par une eau immйdiatement disponible et peu coыteuse. Mais cette dйpendance s’avиre а prйsent а double tranchant car, comme c’est souvent le cas en situation d’abondance, le Brйsil a fait preuve de nйgligence, de gaspillage et d’imprйvision. Aujourd’hui menacйe, la nйcessaire prйservation de la ressource en eau de ce pays passe par de vigoureuses actions correctives dans la gouvernance des rйserves. A ce titre, la promotion d’une gestion par bassin versant semble кtre une approche prometteuse qui mйrite d’кtre explorйe.

Ainsi, saisir tout le paradoxe de la situation du Brйsil au regard de sa ressource hydrique, c’est, dans un premier temps, faire le point de ce qui fait la richesse de ce pays en ce domaine et apprйhender les enjeux humains et йconomiques corrйlatifs. C’est ensuite mettre en exergue ce qui fragilise une telle situation, a priori favorable, pour bien mesurer l’ampleur du dйfi qui s’impose aux autoritйs brйsiliennes. C’est enfin comprendre, fort du constat d’ambivalence de la situation, la nйcessitй d’une sйrie de mesures destinйes а pйrenniser les atouts intrinsиques du Brйsil au plan de la ressource en valorisant, en codifiant et en optimisant ses modes d’exploitation.

PREMIИRE PARTIE. UNE FORMIDABLE RICHESSE HYDRIQUE

Si, comme le prйtendent certains, la richesse d’une nation est amenйe а l’avenir а se mesurer en litres d’eau douce, le Brйsil est sans aucun doute а la tкte d’un capital formidable. Car, parler de l’eau dans un pays comme le Brйsil, c’est d’abord йvoquer une ressource а l’йchelle d’un continent. En effet, fort d’une population estimйe actuellement а environ 180 millions d’habitants (dernier recensement le 1 er aoыt 2000. 169,79 millions d’habitants [1] ), le Brйsil s’йtend sur 8 514 976 kmІ, dont une surface en eaux de 55 457 kmІ, soit 10% de la superficie de la France [2].

Bйnйficiant de cette grande superficie, mais surtout d’un climat et de caractйristiques physiques favorables, le Brйsil dispose de ressources hydriques colossales. Ainsi, si l’on comptabilise l’ensemble du dйbit du bassin amazonique, incluant la contribution des pays d’amont, on estime que la disponibilitй d’eaux superficielles est d’environ 251 000 m 3 /s. Si l’on ne compte que la contribution du territoire brйsilien, celle-ci tombe а environ 180 000 m 3 /s, soit tout de mкme 18 fois le dйbit du fleuve Saint Laurent au Canada [3].

Apprйhender la problйmatique de l’eau au Brйsil, et saisir tout le paradoxe dans la situation de ce pays, nйcessite tout d’abord de procйder а un йtat des lieux dйcrivant les grandes caractйristiques de ses ressources hydriques. A ce titre, l’Amazone constitue, а n’en pas douter, une particularitй et mйritera une attention particuliиre. Enfin, une telle richesse a pour corollaire des enjeux majeurs pour le Brйsil, tant au plan йconomique qu’au plan humain, qu’il conviendra d'йvoquer dans une perspective gйopolitique.

De maniиre gйnйrale, la ressource hydrique naturellement disponible s’articule autour, d’une part, de l’eau accessible en surface et, d’autre part, des nappes souterraines. Dans ces deux domaines, les disponibilitйs sont considйrables au Brйsil.

111. Les cours d’eau

Le Brйsil possиde un des systиmes fluviaux les plus йtendus au monde, avec plusieurs bassins hydrographiques. Outre celui de l’Amazone, qui fera l’objet d’un traitement particulier plus loin, les plus importants sont ceux du Tocantins-Araguaia, du Paranа-Paraguay-Uruguay et du Sao Francisco.

Les bassins de l’Amazone et du Tocantins-Araguaia, au Nord et au centre du pays, reprйsentent а eux seuls 56% de la surface totale des bassins hydrographiques du Brйsil [4].

Le systиme fluvial Paranа-Paraguay-Uruguay couvre la rйgion qui s’йtend de l’Etat du Mato-Grosso, au centre Ouest du pays, vers le sud-ouest et le Sud, jusqu’а atteindre l’Atlantique par le Rio de la Plata prиs de Buenos Aires. Ce systиme est, aprиs celui de l’Amazone, le deuxiиme plus grand de la planиte.

Pour sa part, le Sгo Francisco est le plus grand des fleuves situйs entiиrement au Brйsil. Il prend sa source, comme le Paranа et le Tocantins, dans le plateau central. Il coule sur 3 161 km, d’abord vers le Nord, avant de bifurquer ensuite vers l’Est jusqu’а l’Atlantique.

Cette diversitй des systиmes, associйe а une grande variation climatique et hydrologique, conduit а des situations contrastйes en terme de disponibilitй hydrique.

Le Brйsil a, du point de vue de la ressource en eau de surface, une autre particularitй pour un pays prйsentant une telle superficie. l’absence de grand lac. En revanche, il existe au centre Ouest du pays, une immense rйgion marйcageuse qui couvre prиs de 230 000 kmІ et qui est inondйe pendant la saison des pluies. le Pantanal.

L’autre grande catйgorie de rйserve en eau du pays est constituйe par les ressources souterraines.

L’existence de zones d’accumulation souterraine d’eau est liйe а la nature des diffйrentes formations gйologiques. Les plus favorables occupent environ 45% du territoire. Elles se composent de sйdiments (proportions variйes d’argile, de sable, de calcaires et d’autres йlйments) sous forme de grandes couches. Les moins favorables occupent, quant а elles, les 55% du territoire restant et sont essentiellement composйes de roches cristallines comme le granit, le gneiss, le mica et le basalte. Les conditions d’accumulation y sont plus faibles et seules les roches fracturйes ou trиs altйrйes offrent une certaine permйabilitй.

Au total, les rйserves d’eau souterraine d’eau sont estimйes а 111 661 km 3.

Cependant, au sein de cette imposante ressource souterraine, l’existence de la nappe aquifиre Guarani constitue une donnйe de portйe stratйgique pour le Brйsil. Il s’agit en effet de l’un des plus grands systиmes aquifиres de la planиte, centrй sur le bassin du Paranа-Plata. Appelй йgalement Acuifero Gigante del Mercosur ou Sistema Acuifero Mercosur. il est situй entre les 16 иme et 32 иme parallиle de latitude sud et les 47 иme et 56 иme mйridiens de longitude ouest. Il s’йtend dans les vallйes des riviиres Paranб, Paraguay et Uruguay. Sa superficie, encore mal dйlimitйe, est estimйe а au moins 1,5 millions de kmІ et s’йtend sur cinq pays. la Bolivie, le Paraguay, l’Argentine (oщ la Mar Chiquita en serait une rйsurgence), l’Uruguay (oщ il correspond а la moitiй du territoire) et le Brйsil. En ce qui concerne ce dernier, il occupe plus d’un million de kmІ sous la totalitй des Etats de Goiбs, Sгo Paulo, Mato Grosso do Sul, Paranб et Santa Catarina, ainsi que sous la plus grande partie du Rio Grande do Sul et le sud du Mato Grosso. Sa contenance est actuellement йvaluйe а 55 000 km 3. soit 55 000 milliards de tonnes d’eau (exactement de quoi recouvrir la France d’une couche d’eau йpaisse de 100 m). En rйalitй, les experts estiment que sa contenance est trиs vraisemblablement encore supйrieure. La recharge serait de 160 а 250 km 3 annuels, de telle sorte qu’avec une exploitation de 40 km 3 annuels, on pourrait approvisionner 360 millions de personnes recevant 300 litres par jour.

La rйgion couverte par l’aquifиre abrite 15 millions d’habitants. Le Guarani constitue la principale source d’eau potable pour l’approvisionnement urbain, industriel et agricole et, au Brйsil, plus de 300 villes de 3000 а 500000 habitants sont totalement, ou en partie, approvisionnйes grвce а lui. Au Paraguay, on compte quelques 200 puits qui assument l’approvisionnement des populations de la rйgion centrale du pays et, en Uruguay, on en recense 135, utilisйs pour les services publics et les bains thermaux. En Argentine, on exploite seulement 6 puits d’eau douce thermale dans le secteur oriental de la province d’Entre Rios. Les zones de recharge et de dйcharge du Guarani, correspondant а une importante concentration d’usagers, sont considйrйes commes des zones critiques. C’est le cas des zones de Concordia-Salto (Argentine-Uruguay), de Rivera-Santana do Livramento (Uruguay-Brйsil) et de Ribeirao Preto (Brйsil). Mais la zone la plus importante de recharge et de dйcharge est le corridor transfrontalier qui se trouve entre les territoires du Paraguay, du Brйsil et de l’Argentine.

Le Brйsil peut, de toute йvidence, кtre caractйrisй par l’abondance de ses ressources en eau. Mais, dans l’inconscient collectif, ce pays est traditionnellement associй а une rйgion spйcifique. l’Amazonie. Il est vrai que cette zone, de par sa taille, ses spйcificitйs gйographiques et sa relative impermйabilitй а l’homme, vйhicule un imaginaire d’aventure et de secret. Le fleuve Amazone y joue un rфle tout particulier, sa puissance et son influence sur le milieu ne cessant d’impressionner. Du point de vue de cette йtude, l’Amazone constitue un apport considйrable dans la ressource hydrique du Brйsil et mйrite, а lui seul, un traitement particulier.

Drainant son eau depuis les latitudes 5° Nord et 20° Sud, l’Amazone est le second des plus longs fleuves de la planиte, le premier йtant le Nil. Prenant sa source dans le plateau Andin, а proximitй de l’ocйan Pacfique, il se jette dans l’ocйan Atlantique aprиs une course de 6 570 km.

L’Amazone possиde le plus gros bassin hydrographique de tous les systиmes fluviaux. Il draine ainsi une surface d’environ 6 300 000 kmІ, soit prиs de 40% de l’Amйrique du Sud [5]. La superficie exacte du bassin n’est pas connue avec prйcision car une partie des eaux de l’Orйnoque supйrieur quitte son bassin par le canal Casiquiare au Vйnйzuela. Cette eau alimente le Rio Negro, affluent majeur de l’Amazone parmi les 1100 que compte ce dernier.

L’Amazone posиde un dйbit moyen de 175 000 m 3 par seconde. Celui-ci culmine а environ 211 000 m 3 par seconde au cњur de la saison des pluies (mai-juin). C’est de loin le plus gros dйbit des fleuves du monde, transportant plus d’eau que le Mississippi, le Nil et Chang Jiang rйunis. L’Amazone est responsable а lui seul d’1/5иme du volume total d’eau douce dйversйe dans les ocйans du monde. Le volume d’eau douce et boueuse dйversйe est d’ailleurs tel que la salinitй et la couleur de l’ocйan sont modifiйes а encore 300 km des cфtes.

La forкt tropicale est issue du climat extrкmement humide du bassin amazonien. En effet, l’Amazone et ses affluents s’y йcoule lentement, les rives forestiиres йtant а peine hors d’eau et rйguliиrement inondйes (la largeur du fleuve passant alors а 50 km au lieu des 3 а 14 km normaux). Une fois quittйe la zone andine, la pente est tellement faible (65 m de la frontiиre а l’ocйan) que c’est en rйalitй la poussйe de l’eau en amont qui gйnиre le flux vers la mer. A titre d’exemple, la ville de Manaus, situйe а 1 000 km de l’Atlantique, n’est situйe qu’а 44 m au-dessus du niveau de la mer. Le fleuve, de par ses caractйristiques, joue donc un rфle trиs particulier dans l’existence de ce qui constitue une richesse йcologique majeure а l’йchelle de la planиte. En effet, la forкt amazonienne, plus grande zone forestiиre du monde, а la capacitй d’absorber de gigantesques quantitйs de dyoxide de carbone. Par ailleurs, elle abrite une biodiversitй extraordinaire. au moins 2,5 millions d’espиces d’insectes, des dizaines de milliers de plantes (certains experts estiment qu’un kilomиtre carrй peut contenir jusqu’а 90 000 tonnes de matiиre vйgйtale vivante) et quelque 2000 espиces d’oiseaux et de mammifиres. Cet enjeu dйpasse donc les frontiиres du seul Brйsil pour en faire un centre d’intйrкt planйtaire.

Du reste, les abondantes rйserves en eau ont de maniиre permanente pour corollaire des implications humaines et йconomiques qui font de la ressource hydrique un йlйment consubstantiel de la vie du Brйsil.

Parmi les nombreux enjeux sous-tendus par l’abondance de l’eau, quatre principaux mйritent d’кtre plus particuliиrement йvoquйs. la consommation humaine directe, l’utilisation dans le secteur agro-alimentaire, la production hydro-йlectrique et les voies de communication fluviales.

Garantir а chaque homme la satisfaction des besoins alimentaires indispensables а sa survie est une exigence majeure pour toute sociйtй humaine. A ce titre, l’eau constitue de plus en plus un enjeu stratйgique au plan mondial, au nom de l’ardente obligation de chaque Etat а garantir l’approvisionnement de sa population. Sur cette question, et а l’inverse de nombreux autres pays, le Brйsil possиde un indйniable avantage comparatif. De ce fait, les prйlиvements, assez modeste d’ailleurs par rapport aux grands pays dйveloppйs, restent proportionnellement extrкmement limitйs au regard de la rйserve disponible. En rйalitй, si aucune inquiйtude n’est d’ordre capacitaire, des difficultйs croissantes se font sentir dans la distribution de la ressource, notamment en raison d’un dйveloppement urbain parfois anarchique et volumйtriquement trиs important. Ce point sera abordй de faзon plus spйcifique ultйrieurement.

Le secteur primaire est trиs dynamique et pиse 28% du produit intйrieur brut (PIB) brйsilien [6].

Les principales productions sont le soja, le cafй, les oranges, les cйrйales, le maпs, le soja, le manioc, le riz, la canne а sucre et l’alcool. Les principales exportations agricoles reposent sur le cafй, le soja et les oranges. A elle seule, l’agriculture reprйsente 11% du PIB et emploie 30% de la population active [7]. En 2003, Le secteur agro-alimentaire a formalisй la crйation de 300.000 emplois.

En passe de devenir "la ferme du monde", ce poids lourd d’Amйrique du Sud fait trembler les agriculteurs de toute la planиte, et en particulier les farmers du Texas et du Kansas comme l’ensemble des exploitants agricoles de l’Union Europйenne. Et les motifs de crainte des grandes nations agricoles du monde ne sont pas sans fondement. En tйmoigne la collection de places de n°1 que dйtient cet Etat dans le secteur. Premier producteur mondial de cafй, de sucre, de tabac, de jus d’orange, de soja, de viande bovine et de volaille, le Brйsil parvient а obtenir ces rйsultats grвce а une surface agricole utile comparable а celle des Etats-Unis d’Amйrique (soit 340 millions d’hectares) et deux fois et demie plus grande que celle dont disposait l’Union europйenne а 25 Etats membres. Ce pays de l’hйmisphиre sud bouscule la hiйrarchie agricole mondiale par son rendement, aujourd’hui, supйrieur а celui des Etats-Unis (2,68 tonnes а l’hectare) [8].

Par ailleurs, le secteur agricole brйsilien bйnйficie de la plus-value apportйe par l’Embrapa. Cet organisme de recherche agronomique rattachй au ministиre de l’agriculture brйsilienne, qui compte prиs de 8600 salariйs ainsi que 2221 chercheurs rйpartis dans 37 centres de recherche а travers tout le pays, a permis de rйelles avancйes en matiиre gйnйtique. Ces dйcouvertes scientifiques en matiиre agricole ont, entre autre, accru les rendements et entraоnй la mise au point de nouvelles espиces capables de s’acclimater aux conditions du pays.

Mais l’atout majeur du secteur agro-alimentaire brйsilien, c’est une capacitй de production agricole facilitйe par une ressource hydrique abondante, aisйment accessible et ce а faible coыt. En effet, un tel niveau de production en vйgйtaux sous-entend de faзon corrйlative un prйlиvement en eau consйquent.

Ainsi, а l’йchelle du pays, les principaux secteurs consommateurs d'eau sont l'agriculture et l'industrie, suivis par le secteur des mйnages. La prйsence de l’eau et des surfaces cultivables font le potentiel agricole du Brйsil. Or, les techniques et la pratique de l'irrigation sont de faзon gйnйrale peu efficaces (Banque mondiale, 1999). S’en suit un prйlиvement croissant en eau. Ce phйnomиne est en outre favorisй par l’importance de certaines productions trиs exigeantes en eau. C’est, par exemple, le cas du soja qui nйcessite un apport jusqu’а trois semaines avant la rйcolte.

L'industrie utilise йgalement de vastes quantitйs d'eau. En Amйrique du Sud, on estime que les prйlиvements industriels d'eau atteignent chaque annйe 15 km 3. dont 80% en Argentine et au Brйsil (ACAA, 2001) [9]. De mкme, le secteur minier, surtout au Chili et au Pйrou il est vrai, consomme des quantitйs grandissantes d'eau.

Enfin, la demande d'eau а usage mйnager augmente aussi. Cependant, tel qu’on le verra plus loin, les inйgalitйs entre les usagers, mкme pour ce pays riche en eau, sont choses courantes.

En 2004, 92% de l’йnergie йlectrique produite au Brйsil йtait d’origine hydroйlectrique [10]. Il existe plus de 2000 barrages au Brйsil (selon les estimations, il existe 800 000 barrages dans le monde [11] dont 45 000 sont considйrйs comme des grands barrages [12] ), les 2/3 du potentiel de production se trouve dans la rйgion amazonienne.

Toujours en 2004, le Brйsil comptait 112 usines hydroйlectriques, pour seulement 22 usines thermiques d’une production supйrieure ou йgale а 30 MW (annexe 11). Le « systиme intйgrй national » (SIN) se caractйrise donc par l’exploitation prйfйrentielle du potentiel hydroйlectrique, afin de produire une йnergie jugйe propre, renouvelable et assortie d’un coыt opйrationnel rйduit, et par une production thermique complйmentaire (essentiellement au gaz). Il s’appuie sur une architecture intйgrйe par un complexe systиme de transmission qui s’йtale sur 4 000 km du Nord au Sud.

La plus grosse unitй du Brйsil, le barrage d’Itaipщ, est la plus grande centrale hydroйlectrique du monde aprиs le barrage des Trois Gorges en Chine. Situй sur le fleuve Paranа, il s’agit d’un barrage а contrefort de 196 m de haut, dont le rйservoir a une surface de 135 000 ha pour un volume de 29 000 hm 3.

A sa construction, en1984, la capacitй de la centrale йtait de 12 600 MW (18 unitйs de 700 MW) [13]. Deux nouveaux gйnйrateurs, mis en fonction en 2006, ont portй la capacitй de production а 14 000 MW, ce qui йtablit la production annuelle а plus 100 milliards de KWh (ou 100 TWh). Exploitй en collaboration avec le Paraguay, cet ouvrage produit 95% de l’йlectricitй consommйe par ce pays.

D’une maniиre gйnйrale, les cours d’eau reprйsentent des axes commerciaux et de peuplement importants qui ont historiquement jouй un grand rфle. Emblйmatique sur ce point, l’Amazone a permis la pйnйtration par l’homme de la forкt tropicale. Premier europйen а dйcouvrir le fleuve en l’an 1500, Vincente Yaсez Pinzon, а la tкte d’une expйdition espagnole, limita а l’йpoque son exploration а la zone de l’embouchure. Progressivement, les portuguais installиrent quelques comptoirs sur les rives afin de commercer avec les amйrindiens et de les йvangйliser. L’essor du vaste espace intйrieur dйbuta rйellement le 6 septembre 1850 quand l’empereur, Pierre II du Brйsil, autorisa la navigation des vapeurs sur l’Amazone. La « Compania de Navigacao e Commercio do Amazonas » fut fondйe en 1852 а Rio de Janeiro. En 1857, le gouvernement obligea la compagnie а mettre en place des liaisons rйguliиres sur le fleuve, jettant les bases d’un dйveloppement йconomique. Le 31 juillet 1967, le gouvernement, sous la pression du pouvoir maritime et des pays encerclant le bassin supйrieur de l’Amazone, dйcrйta l’ouverture du fleuve а tous les pavillons. Les premiers йchanges commerciaux entre Manaus et l’йtranger dйbutиrent en 1874. Le commerce local fut par la suite dйveloppй par une compagnie britannique. « the Amazon Steam Navigation Company », notamment autour de la production de caoutchouc.

Aujourd’hui, le caractиre pionnier mis а part, les cours d’eau continuent de jouer un rфle important dans l’acheminement des hommes et du fret. Ainsi, l’Amazone est navigable pour les grosses unitйs jusqu’а Iquitos, а 3 700 km de la mer, et pour les plus petits vaisseaux, sur 780 km supplйmentaires jusqu’а Achual. Au-delа, les petits bateaux utilisent frйquemment le Pongo de Manseriche. Mais l’exploitation des voies navigables ne se limite pas а l’Amazone. Les Brйsiliens utilisent parfois de faзon intense les combinaisons fleuves/canaux. les « hidrovнas ». Les deux plus importants s’articulent autour du fleuve Paranб.

L' Hidrovнa Paranб-Paraguay est la grande voie navigable formйe par l'axe Rнo Paranб - Rнo Paraguay. reliant les villes brйsiliennes de Cбceres et de Cuiabб. dans l'Etat de Mato Grosso. au Rнo de la Plata et au port de Buenos Aires. c'est а dire а l' Ocйan Atlantique. Pйnйtrante stratйgique, il permet ainsi de relier par voie fluviale cinq pays d' Amйrique du Sud. les quatre pays du Mercosur et la Bolivie. Prйcisons que cette voie a йtй en continuelle amйlioration au cours des derniиres dйcennies. Certains obstacles а la navigation de fort tonnage subsistant encore, plusieurs travaux d'infrastructure collatйraux sont planifiйs ou en voie d'achиvement.

L' Hidrovнa Paranб-Tietк est une voie de navigation brйsilienne situйe entre trois rйgions, rйgion Sud, rйgion Sud-Est, et rйgion Centre-Ouest, qui permet le transport de charges et de passagers au long des Rios Paranб et Tietк. C'est une voie trиs importante pour l'йcoulement de la production agricole des Etats de Mato Grosso. Mato Grosso do Sul. Goiбs et partiellement de Rondфnia. Tocantins et Minas Gerais. Actuellement l'hidrovнa transporte 2 millions de tonnes de frкt par an (chiffres de 2001). On y a construit 12 terminaux portuaires, distribuйs sur une surface de 760 000 kilomиtres carrйs. Dиs l'entrйe en opйration de cette voie, on a favorisй l'implantation de 23 pфles industriels, de 17 pфles touristiques et de 12 pфles de distribution, soit plus ou moins 4 mille emplois directs [14].

Gйant de la ressource hydrique, le Brйsil possиde un avantage comparatif йnorme au plan international grвce aux capacitйs immйdiatement disponibles dans ses rйserves de surfaces et souterraines. A l’heure oщ l’eau s’affirme comme une ressource de plus en plus rare et а valeur stratйgique, le gouvernement dispose d’un atout de nature а favoriser la stabilitй politique et la croissance йconomique. Historiquement, cette derniиre repose d’ailleurs pour une part importante sur l’eau, notamment au plan de la production йnergйtique, de la production agroalimentaire et des voies de communications.

Pourtant, cette richesse cache difficilement des difficultйs, sans doute liйes, mais pas uniquement, а l’imprйvision, souvent caractйristique des situations d’abondance.

DEUXIИME PARTIE. PARADOXALEMENT D’IMPORTANTES FAIBLESSES

Possйdant approximativement 12% de l’eau douce qui s’йcoule а la surface de la planиte, le Brйsil est considйrй comme un pays trиs riche d’un point de vue hydrologique. Cependant, s’en tenir а ce simple constat serait mйconnaоtre de nombreuses difficultйs, immйdiates ou potentielles, pesant sur cette ressource. Tout d’abord, l’abondance а l’йchelle du pays dissimule l’inйgale rйpartition territoriale des rйserves en eau. D’autre part, de multiples menaces pиsent sur ces derniиres avec de graves consйquences, compte tenu notamment des importants enjeux induits qui ont йtй dйcrits prйcedemment. Enfin, comme tout avantage comparatif dйtenu par un pays dans un contexte permanent de rivalitй gйostratйgique, la richesse hydrique peut-кtre une source de convoitise au plan international.

La richesse hydrologique est rйpartie de faзon inйgale. il y en a 70% en Amazonie, rйgion oщ vit moins de 7 % de la population nationale, 15% dans le Centre-Ouest, 6% dans le Sud et le Sud-Est et а peine 3% dans le Nordeste, dont les 2/3 sont situйs dans le bassin du fleuve Sгo Francisco [15]. L’influence du climat est bien entendu prйgnante sur cette situation. L’йtude d’une carte des zones climatiques au Brйsil permet d’ailleurs de distinguer, d’emblйe, la situation singuliиre de la rйgion du « Nordeste ».

Le Nordeste couvre 1,5 million de kmІ et compte neuf Etats. Bahia, Sergipe, Alagoas, Pernambuco, Paraнba, Rio Grande do Norte, Cearб, Piauн et Maranhгo. La population de la rйgion est d’environ 50 millions d’habitants (32 hab/kmІ), ce qui pose de faзon aiguл la question de l’approvisionnement en eau.

Historiquement, le Nordeste a connu une brиve expansion йconomique fondйe sur le sucre, ses plantations йtant alors la principale source de revenu. Le dйclin s'est fait sentir dиs le dйbut du XVIII йme siиcle et s'est poursuivi jusqu'а l'йpoque moderne. Aujourd'hui, le Nordeste est synonyme de pauvretй et de famine, semblable en cela aux nations les plus pauvres d'Afrique. Les problиmes du Nordeste ont tous la mкme origine. une terre incapable de nourrir ses habitants. Hormis la longue bande de terre fertile qui borde la cфte de Bahia а Rio Grande do Norte, la rйgion est une vaste steppe semi-aride. La vallйe du fleuve Sгo Francisco est l'une des rares zones fertiles de tout le Nordeste.

Si l’on s’en tient au classement de l’Organisation Mondiale de la Santй (OMS) relatif а la disponibilitй hydrique par habitant des rйgions du monde, on peut distinguer 3 catйgories de rйgions.

-les rйgions d’abondance. quantitй supйrieure а 20 000 m 3 /personne/an,

-les rйgions intermйdiaires. quantitй d’environ 5 000 m 3 /personne/an,

-les rйgions en situation critique. quantitй infйrieure а 1500 m 3 /personne/an.

Au Brйsil, tout les Etats de la rйgion Nord sont classйs dans les rйgions d’abondance, le Roraima arrivant mкme а l’incroyable chiffre de 1,7 milliard de m 3 /personne/an. A contrario, au Nordeste, seul le Piauн est en position intermйdiaire, grвce а la relative richesse hydrologique de son sous-sol sйdimentaire et а l’existence d’un grand fleuve constant, le Parnaiba, qui constitue la frontiиre avec le Maranhгo. L’Etat de Bahia, dont l’approvisionnement est lйgиrement supйrieur а 2 500 m 3 /personne/an, arrive а avoir d’avantage d’eau que l’Etat de Sгo Paulo car il bйnйficie de l’apport du fleuve Sгo Fransisco. La situation des autres Etats nordestins (Sergipe, Alagoas, Pernambuco, Paraнba, Rio Grande do Norte et Cearб) est prйoccupante avec un approvisionnement infйrieur а 2 500 m 3 /personne/an. Deux Etats se distinguent tout particuliиrement dans l’adversitй. le Paraнba avec 1437 m 3 /personne/an et le Pernambuco avec 1320 m 3 /personne/an [16].

L'inйgalitй de la rйpartition dans le pays, avec un dйsavantage йvident du Nordeste brйsilien, est la consйquence de caractйristiques gйo-environnementales de la rйgion, surtout avec la prйsence du bouclier cristallin sur prиs de 70% de la superficie semi-aride nordestine (ce qui rend difficile la constitution de rйserves dans le sous-sol), de la topographie, avec le manque de percйes fluviales pouvant кtre fermйes, et des sйcheresses qui ravagent habituellement la rйgion.

Au-delа des inйgalitйs dans la rйpartition gйographique de l’eau, d'autres problиmes sont venus aggraver la raretй des ressources hydrologiques, la hausse de la tempйrature moyenne, augmentant le taux d'йvaporation, la dйforestation autour des sources, la pollution, l'accroissement des villes, l'augmentation de la demande pour la consommation humaine et l'irrigation, ainsi que la mauvaise gestion des ressources hydrologiques. Tout ces points constituent autant de menaces а l’endroit de la richesse en eau du Brйsil.

Comme cela l’a йtй soulignй prйcйdemment, la richesse hydrique du Brйsil a conduit ce pays a appuyer de faзon considйrable son expansion йconomique et humaine sur cette ressource en eau facilement accessible et peu onйreuse. Une forme d’interaction trиs poussйe, voire de dйpendance, s’est donc instaurйe entre l’homme et l’eau. Mais cette dйpendance induit une faiblesse rйciproque susceptible d’affecter en miroir la ressource et l’activitй humaine. Ce phйnomиne peut notamment s’observer au travers de trois manifestations. la variation dans le dйbit des fleuves, la dйpendance йnergйtique et la pollution.

Les sйrieuses variations qui se sont faites sentir dans le dйbit de l’Amazone apparaissent emblйmatique du problиme rencontrй. Il faut tout d’abord reconnaоtre que cela trouve, pour une part, son explication dans le phйnomиne naturel « El Niсo » (а l’instar de l’annйe 1963), qui a provoquй une importante sйcheresse. Ce phйnomиne climatique est connu sous le nom d’« ENSO » (El Niсo – Southern oscillation ) [17]. En effet, le dйbit des eaux du fleuve Amazone est corrйlй а une pluviomйtrie trиs influencйe par les variations des tempйratures de surface de l’ocйan Pacifique tropical et de l’ocйan Atlantique tropical. La baisse du dйbit de l’Amazone correspond а une tendance lourde constatйe depuis 1999. Les mesures rйalisйes а la station brйsilienne d’Obidos (situйe а 800 km de l’Atlantique) le montrent. Le volume maximal des eaux roulйes par le fleuve, alimentй par le rio Solimoes (qui prend sa source au Pйrou), par le rio Madeira (Bolivie) et par le rio Negro, est ainsi passй de 267 000 mиtres cubes par seconde en 1999 а
226 000 mиtres cubes par seconde en 2003 [18].

El Nino n’est pas la seule cause des variations de dйbit. Selon certains experts, la dйforestation serait la principale cause des basses eaux enregistrйes. En effet, elle aurait entraоnй un dйrиglement du rйgime d’йvapo-transpiration de la forкt qui gйnиre 50% des pluies sur le bassin amazonien.

Ces variations emportent bien entendu de nombreuses consйquences. Au plan humain, l’accиs а l’eau potable s’en trouve rarйfiй sur certaines zones et s’accompagne de pathologies caractйristiques (diarhйe, hйpatite, typhoпde) [19]. Par ailleurs, au plan йconomique, des incidences se font clairement sentir sur la capacitй а maintenir le trafic fluvial et les flux йconomiques associйs, dans une rйgion oщ le trafic routier et, a fortiori. aйrien est trиs rйduit. Cela compromet notamment, par une certaine forme d’ironie du sort, l’export de bois. L’assиchement des cours d’eau pourrait en outre avoir des rйpercussions notables sur certaines populations animales dйjа menacйes. Le ministиre de l’environnement brйsilien s’inquiиte ainsi du sort de deux espиces protйgйes. le "boto", petit dauphin d’eau douce, et le lamantin.

Avec une production hydroйlectrique а hauteur de 92% de la production totale nationale (cf. §133), le Brйsil s’est mis en situation d’йtroite dйpendance йconomique vis-а-vis de la ressource hydrique. En effet, les statistiques mettent en йvidence une corrйlation entre la demande йlectrique et le niveau du produit intйrieur brut.

Le phйnomиne de variation du dйbit des fleuves, dйcrit au paragraphe prйcйdent, gйnиre des contraintes trиs importantes sur la capacitй de production issue du harnachement des eaux et peut dйboucher sur des situations de pйnurie. Cela a notamment йtй le cas en 2001, avec ce que les brйsiliens ont appelй l’« apagao », c'est-а-dire la « coupure ». A l’йpoque, cela s’est traduit par un grave rationnement йlectrique (de l’ordre de 20% de la consommation nationale) et par deux coupures complиtes [20].

La pollution des cours d’eau et des nappes souterraines illustre а nouveau une forme d’interaction nйgative entre l’homme et son milieu. Trois facteurs principaux contribuent а ce phйnomиne. l’activitй agricole, l’activitй miniиre et les rejets domestiques.

L’activitй agricole, sous sa forme intensive en particulier, gйnиre une pollution des rйserves hydriques du faits de l’utilisation des intrants (engrais et pesticides). Le Brйsil n’йchappe bien sыr pas а cette rиgle, et l’importance de la production agricole pour la balance commerciale du pays est mкme de nature а favoriser des schйmas productivistes qui s’accomodent souvent mal des considйrations йcologiques.

A titre d’illustration, l’exemple de l’Etat de Bahia peut кtre citй. Depuis dix ans, la culture du cacao y est gravement touchйe par un champignon appelй « balai de sorciиre » (Cripinellis perniciosa ), qui a fait chuter la production. Aussitфt, des traitements а base de cuivre ont йtй utilisйs pour enrayer la maladie. Le cuivre, en partie lavй par les eaux de pluie, se retrouve dans l’eau de la riviиre Cachoeira oщ vivent crevettes et crabes consommйs par les populations locales.

Mais quand on parle de pollution au Brйsil, on pense surtout au mercure. Tout d’abord, il convient de prйciser que le mercure est naturellement prйsent dans la nature. Projetй hors des volcans, il s'йvapore des plans d'eau et s'йchappe de l'йcorce terrestre sous forme de gaz. Il retombe sur terre dans l'eau de pluie et se dйpose dans les sols et les sйdiments, dans les ocйans et les lacs. Cependant, le Brйsil est dans une situation dйfavorable face а cette menace car les sols amazoniens sont trиs vieux. de 500 000 ans а un million d'annйes. Le mercure prйsent dans l'atmosphиre s'y dйpose donc depuis trиs longtemps et l’on en trouve de fortes concentrations dans le sol (des teneurs dix fois plus йlevйes que celles enregistrйes dans les pays tempйrйs). Or, cette rйgion a connu une colonisation massive au cours des quarante derniиres annйes et la majoritй des colons ont adoptй l'agriculture comme mode de subsistance. Ils ont donc abattu de larges pans de forкts, habituellement par brыlis. De mкme, lorsque ces sols dйfrichйs perdent leur fertilitй aprиs quelques annйes, les agriculteurs dйfrichent les parcelles adjacentes en abattant les arbres et en les brыlant. Йtant donnй que les chemins sont souvent rares dans des rйgions accessibles principalement par voies navigables, l'agriculture sur brыlis et la dйforestation qui en rйsulte se produisent surtout le long des rives. Le sol contaminй par le mercure йtant ainsi exposй, le ruissellement des grandes pluies entraоnent les contaminants vers les systиmes fluviaux. Lа, les micro-organismes et les plantes aquatiques absorbent le mercure et le transforment en mйthylmercure, substance trиs nocive pour les humains. Les petits poissons consomment ces plantes aquatiques contaminйes et le methylmercure passe ainsi dans la chaоne alimentaire jusqu'aux prйdateurs supйrieurs.

Cйlиbre pour ses chercheurs d’or, le Brйsil l’est aussi pour la pollution que cette activitй gйnиre. En effet, l'orpaillage s'est trиs sensiblement dйveloppй depuis une quarantaine d'annйes dans cette rйgion du monde. Or, pour sйparer l'or des particules prйlevйes dans les alluvions dйposйes par les riviиres, les orpailleurs utilisent du mercure. Trиs dense, le mercure a la propriйtй de s'amalgamer aux fines paillettes d'or qui sont ainsi isolйes des autres particules. Un chauffage au chalumeau permet ensuite de sйparer le mercure de l'or. le mercure se vaporise sous l'effet de la chaleur tandis que l'or, insuffisamment chauffй, reste solide. Au cours de ces manipulations, 5 а 45 % du mercure est rejetй directement dans les riviиres. Le reste s'йvapore sous forme de mercure йlйmentaire dans l'atmosphиre et finira par « retomber », contaminant l'environnement jusque dans des sites йloignйs des lieux d'йmission.

Les techniques industrielles de recherche de l’or sont йgalement polluantes en raison, d’une part, des dйchets de cyanures qu'elles produisent. D'autre part, l'usage de pompes et de puissants jets d'eau pour dйsintйgrer les sols et les rйduire en boue qu'on mйlange au mercure pour en extraire l'or est source d'une pollution par destruction du sol, par augmentation de la turbiditй de l'eau, et par la mise en suspension de mйtaux lourds ou minйraux indйsirables, certes naturellement prйsents, mais normalement fixйs dans les sols.

D’autres types d’exploitations miniиres, telles que les mines de fer et de diamants dans l’Etat du Minas Gerais, peuvent aussi кtre incriminйes en raison de leur impact nйfaste sur la ressource hydrique.

Les centres urbains ont frйquemment eu un dйveloppement anarchique au Brйsil. Cette croissance dйsordonnйe a souvent eu pour consйquence des rйseaux d’eau approximatifs, voire inexistants. C’est ainsi que dans le domaine des eaux usйes, trиs sensible au plan environnemental, des carences dramatiques sont constatйes. On estime qu’environ 96 millions de personnes ne disposent pas d’un rйseau d’йgout [21]. De mкme, 45% de la population du pays n’a pas accиs а l’eau traitйe quand, dans le mкme temps, les rйseaux de distribution dйfectueux entraоnent une perte de 46% de l’eau acheminйe (soit l’йquivalent des besoins d’approvisionnement en eau cumulйs de la France, de la Belgique, de la Suisse et du nord de l’Italie) [22].

Par ailleurs, divers rejets contribuent а polluer de maniиre dramatique les rйserves hydriques. Pour exemple, le Brйsil consomme en moyenne 100 millions de lampes fluorescentes par an. Considйrйes comme des dйchets trиs toxiques, 94% sont jetйes sans traitement particulier, ce qui entraоne la pollution par des mйtaux lourds des nappes phrйatiques et de l'air.

D’une maniиre gйnйrale, l’industrialisation du pays et le peuplement urbain ne se sont pas accompagnйs de la nйcessaire installation des stations d’йpuration des йgouts. Cette « dette sociale passive » constitue а n’en pas douter un des dйfis majeurs de la sociйtй brйsilienne pour l’avenir.

A l’heure oщ nul n’ignore plus l’enjeu reprйsentй par la possession et l’exploitation des rйserves hydriques, trois catйgories d’acteurs, outre l’Etat fйdйral et les Etats fйdйrйs, rivalisent au Brйsil pour conforter leur positionnement respectif. la population, les entreprises privйes et certains Etats йtrangers.

Les conflits entre usagers multiples sont frйquents au Brйsil et prennent des formes diverses. Relevant parfois des traditionnels incidents entre les usagers d’amont, accusйs de sur-utiliser les cours d’eau ou de les contaminer, et les usagers d’aval, les conflits revкtent parfois des formes plus complexes.

Il en va ainsi des des conflits trиs sйrieux entre les compagnies d’assainissement chargйes de l’alimentation en eau des villes et l’industrie en gйnйral (agro-alimentaire en particulier). De mкme, les tensions entre gros exploitants et les micropropriйtaires sont rйcurrentes. Ce type d’antagonisme s’est parfois traduit par des morts d’hommes comme, par exemple, lors du conflit opposant les petits irrigants et les grands propriйtaires dans le bassin hydrographique du fleuve Salitre, affluent du fleuve Sгo Franscisco, dans le territoire de l’Йtat de Bahia.

Mais l’exemple le plus rйpandu concerne les fortes rivalitйs entre les usagers du secteur hydroйlectrique et la population. C’est en fait la problйmatique des constructions de barrages et de leurs multiples consйquences qui sous-tend ce type de conflit. Au Brйsil, dont on a constatй le volontarisme dans le dйveloppement du secteur hydroйlectrique, la tension est exacerbйe et a donnй lieu а certaines formes de rйsistance de populations locales qui se sont organisйes pour faire entendre leur voix. C’est l’origine de mouvements trиs reprйsentatifs de l’opposition populaire tels que le MAB (Movimento dos Atingidos por Barragens ) ou Mouvement des personnes affectйes par les barrages. Les consйquences, tant positives que nйgatives, de la construction d’un barrage important sont effectivement nombreuses.

Trois foyers principaux de rйsistance peuvent кtre considйrйs comme le berceau du MAB:

en premier lieu, dans la rйgion Nord-Est, а la fin des annйes 70, la construction de l’usine hydroйlectrique (UHE) de Sobradinho dans la localitй de Rio Sгo Francisco, oщ plus de 70000 personnes ont йtй dйlogйes, et plus tard celle de l’UHE d’Itaparica, thйвtre d’une grande mobilisation populaire ;

deuxiиmement, au Sud, presque simultanйment, en 1978, dйbute un important processus de mobilisation contre la construction de l’UHE d’Itaipu, dans la baie du Fleuve Paranб, et des usines de Machadinho et d’Itа, dans la baie du Fleuve Uruguai ;

enfin, dans la rйgion du Nord, а la mкme pйriode, la population locale s’est organisйe pour revendiquer ses droits lors de la construction de l’UHE de Tucuruн.

Tous ces ouvrages, ainsi que d’autres au Brйsil, qu’ils soient rйalisйs ou en projet, donnent encore lieu aujourd’hui а une forme d’opposition populaire.

Elles aussi conscientes des enjeux de profit liйs а l’eau dans un pays comme le Brйsil, les sociйtйs privйes multinationales spйcialisйes dans le traitement de l’eau, la mise en place de rйseaux d’adduction et la production hydroйlectrique rivalisent sur ce marchй et dйveloppent des stratйgies d’implantation, soit sous forme d’investissements directs а l’йtranger (IDE), soit en crйant des joint ventures. L’exemple de la sociйtй Suez et de sa filiale belge Tractabel, particuliиrement active au brйsil, est, de ce point de vue, trиs instructif.

La force des sociйtйs du niveau de Suez repose tout d’abord dans l'accumulation et la synergie de compйtences et de techniques industrielles diffйrentes. Ainsi, Suez « c'est » l'eau, les mйtiers dйrivйs comme l'йpuration ou la dйsalinisation, l'йnergie, l'ingйnierie, le traitement des dйchets et, de maniиre gйnйrale, les "sous-compйtences" de ses "sous-filiales". Ainsi, la construction du barrage brйsilien de Cana Brava a йtй confiйe а l'entreprise franзaise Coyne et Bellier, qui est une filiale de Tractebel [23].

Par ailleurs, la tendance actuelle des pouvoirs publics nationaux et supranationaux а йdicter des normes "environnementales" et sanitaires de plus en plus sйvиres s’avиre profitable pour les sociйtйs transnationales. En effet, elles sont les mieux armйes pour rйpondre а ces exigences, йtant entendu que les surcoыts sont susceptibles d’кtre externalisйs (pris en charge par la collectivitй ou par le consommateur). Ce type de perspectives de durcissement de la rйglementation est de nature а inciter le Brйsil а ouvrir а la privatisation ses rйseaux de captage, de stockage, de distribution et de traitement de l'eau.

De ce point de vue, les sociйtйs comme Suez ou Veolia bйnйficient d’ailleurs de l’action de la Banque mondiale et de la Banque interamйricaine de dйveloppement qui facilitent indirectement leur entrйe sur le marchй latino-amйricain. En effet, les prкteurs multilatйraux font souvent des progrиs structurels dans la distribution de l'eau, dans le domaine sanitaire et dans la prйservation de l’environnement une « condition » а l'allиgement de la dette ou а de nouveaux prкts.

Enfin, certaines entreprises s’associent ponctuellement а des organisations non-gouvernementales (ONG) pour favoriser leur implantation. Ainsi, au Brйsil, l’ONG Essor prйsente, sur un site intitulй "Human village, le portail de la solidaritй", ses rйalisations "de terrain". Parmi celles-ci, on peut noter le partenariat Essor-Aguas Amazones, filiale de Suez, visant а accompagner cette derniиre "lors de la mise en place du rйseau d'eau dans les quartiers dйfavorisйs. sensibilisation а la problйmatique de l'eau, recherche de solutions personnalisйes, animation de groupe de jeunes" [24]. etc.

Les sociйtйs de « l’eau » dйveloppent donc des stratйgies et utilisent l’ensemble de leurs atouts pour pйnйtrer les marchйs. Outre les luttes d’influence auxquelles se livrent ces sociйtйs dans un secteur extrкmement concurrentiel, cette dйmarche gйnиre des tensions car le mouvement d’opposition а la privatisation de la ressource hydrique n’a cessй de prendre de l’ampleur, avec une structuration thйorique autour de notions tel que le bien public, par exemple. La tension est d’autant plus forte que, de faзon plus pragmatique, la privatisation de la gestion de l’eau doit rйpondre а des critиres de rentabilitй qui suscitent l’inquiйtude des usagers, craignant une hausse de leur facture.

Bien entendu, en termes gйopolitiques, le Brйsil dispose, avec son capital hydrique, d’un avantage comparatif considйrable par rapport а d’autres Etats. Cette situation se traduit par une certaine convoitise, avйrйe ou prйsumйe, а l’йchelle rйgionale et au-delа.

Au plan rйgional, certaines rivalitйs inter-йtatiques, surtout liйes а la gestion et а l’exploitation de fleuves frontaliers, voient parfois le jour. Les tensions qui ont entourй pendant des annйes le projet du barrage d’Itaipщ (voir § 133), entre le Brйsil et le Paraguay, illustrent parfaitement ce type de conflit d’intйrкts.

La convoitise peut aussi se mesurer а l’йchelle du continent. D’aucuns considиrent ainsi que l’activisme militaire des Etats-Unis dans la rйgion dite de « la triple frontiиre », qui unit le Brйsil, l’Argentine et le Paraguay, est ambigu. En effet, les Etats-Unis, dans le cadre de leur lutte contre le terrorisme international et le narco-trafic, affirment avec insistance que cette zone est un refuge d’activistes ou de sympathisants d’organisations а vocation terroriste [25]. Ils ont donc dйployй des troupes avec l’accord des Etats concernйs, qui redoutent d’йventuelles actions criminelles nйfastes а. localement vitale, du tourisme. Or, il se trouve йgalement que c’est dans ce corridor transfrontalier que se trouve une des plus importante zone de recharge et de dйcharge de l’aquifиre Guaranн (voir § 112). Certains auteurs, traditionnellement hostiles а la politique йtrangиre amйricaine il est vrai [26]. voient lа plus qu’une simple coпncidence, mettant notamment en perspective cette prйsence avec, d’une part, le constat de rйduction des rйserves hydriques des Etats-Unis (voir а ce sujet les travaux des Canadiens Barlow et Clark, auteurs du dйsormais cйlиbre ouvrage L’or bleu ) et, d’autre part, le rapport intitulй Santa Fe IV [27]. Ce dernier, йtabli en 2000 par les nйo-conservateurs au sein du Parti rйpublicain, prйsentaient les principaux йlйments stratйgiques susceptibles de jouer, а leurs yeux, un rфle fondamental dans la sйcuritй nationale des Etats-Unis. Dans ce cadre, il soulignait la nйcessitй pour les pays oщ se trouve le Guaranн de promulguer des lois protйgeant l’aquifиre en tant que patrimoine. Parallиlement, il affirmait la nйcessitй pour les Etats-Unis de s’assurer « de la disponibilitй des ressources naturelles pour rйpondre
а…[leurs]…prioritйs nationales ».

En tout йtat de cause, et si les vues des Etats-Unis sur les rйserves du Guaranн ne sont pas avйrйes, il n’en demeure pas moins que le capital hydrique du Brйsil ne peut qu’aiguiser les appйtits de voisins plus ou moins йloignйs, potentiellement en proie, а plus ou moins long terme, а un manque de ressources hydriques.

Une analyse un peu plus poussйe montre que le Brйsil, malgrй une richesse incontestable au plan des rйserves en eau, n’est pas а l’abri de difficultйs majeures dans la gestion des ressources hydriques. Ces derniиres, mal rйparties sur le territoire et exposйes а de nombreuses menaces, sont susceptibles de fragiliser certains pans de l’activitй humaine et йconomique du pays et sont source de luttes intestines et de convoitise. Soucieux de protйger et de rationaliser la ressource, le gouvernement brйsilien recherche activement les voies permettant une saine gestion des rйserves.

TROISIИME PARTIE. PROJETS ET PERSPECTIVES

On l’a compris, le dйfi que doivent relever les autoritйs brйsiliennes est considйrable, notamment au regard de l’interpйnйtration des enjeux humains et йconomiques du pays avec les questions relatives а la prйservation et а l’exploitation des ressources en eau potable. Conscients de la nйcessitй d’agir pour amйliorer la situation, les dйcideurs se sont engagйs depuis plusieurs annйes, et parfois sur fond de querelles politiciennes et idйologiques, dans une dйmarche de valorisation de la ressource disponible. Cette dйmarche s’articule autour de trois axes principaux. d’une part, une sйrie de projets destinйe а mieux protйger les rйserves, а gommer certaines inйgalitйs gйographiques ou а amйliorer le potentiel des cours d’eau, d’autre part, la mise en place d’un cadre lйgislatif cohйrent encadrant l’exploitation des ressources hydriques et dйfinissant les responsabilitйs respectives dans ce domaine des diffйrents acteurs institutionnels ou privйs et, enfin, le dйveloppement de modes de gestion innovants susceptibles de favoriser une exploitation rйflйchie et durable des rйserves.

Le Brйsil cherche а protйger sa ressource, notamment en luttant contre une dйforestation incontrфlйe, dont il a йtй montrй que les consйquences sont particuliиrement nйfastes sur les rйserves d’eau de surface et souterraines (voir § 221 et 223). Par ailleurs, ce pays poursuit sa politique de grands travaux afin, d’une part, de mettre en valeur le potentiel йconomique offert par la puissance et la ramification des cours d’eau dont il dispose et, d’autre part, d’amйliorer l’approvisionnement de certains zones gйographiques victimes d’un stress hydrique structurel. Deux ensembles de projets apparaissent emblйmatiques de cette volontй. le projet Madeira et le projet de soutien au Nordeste.

Le problиme de la dйforestation lйgale et illйgale au Brйsil –et surtout en Amazonie– constitue, а lui seul, un immense sujet qui mйriterait des dйveloppements importants. Cependant, au regard des interactions dйjа dйcrites entre cette problйmatique et la capacitй а prйserver la ressource hydrique, il est nйcessaire d’йvoquer trиs briиvement la dйmarche entreprise par le gouvernement brйsilien.

Ce dernier, parfaitement conscient des enjeux, est nйanmoins ballotй entre les intйrкts йconomiques (implantation de systиmes agricoles productifs focalisйs sur le soja et la viande bovine, qui constituent une source importante de devises pour le pays) et les gros efforts en faveur de la protection de l'environnement.

L'Etat brйsilien semble nйanmoins engagй dans une recherche d’organisation rationnelle du territoire, prenant en considйration les deux intйrкts contradictoires. Cependant, devant la rapiditй des mutations en cours et le fait que, pour la plupart, elles ne sont pas impulsйes par l'Etat mais dirigйes par des acteurs privйs, on peut se demander quelle est la capacitй rйelle du gouvernement а atteindre ce but. Les initiatives basйes sur la valorisation йconomique de la forкt «en pied» rencontrant peu d'йcho, il ne lui reste souvent comme ressource que de classer d'amples surfaces en Unitйs de Conservation, seule barriиre qui semble а peu prиs retenir la progression du front agricole et de la dйforestation sauvage, mais au prix de conflits locaux parfois violents et d'une incomprйhension croissante (et proportionnelle а leur efficacitй) entre les services du ministиre de l'Environnement et les populations locales. Ainsi le gouvernement a crйй de nombreuses rйserves forestiиres de protection et d’exploitation durable, comme le parc du Xingu, les Terres Indigиnes connexes ou la Terre Indigиne Yanomami. Ces zones reprйsentent 7,7 millions d’hectares.

Par ailleurs, depuis 2003, le gouvernement met en place une sйrie d’opйrations de contrфle, et les sanctions adoptйes se sont intensifiйes. En 2005, ce ne sont pas moins de 52 000 m 3 de bois illйgalement coupйs qui ont йtй saisis. Plusieurs bases ont йtй installйes en Amazonie а cet effet.

Il a йgalement йtй annoncй l’emploi d’un nouveau systиme de contrфle par satellite (Deter), permettant de balayer la zone plus frйquemment. Il sera ainsi possible de renforcer la rйactivitй dans l’envoi d’unitйs dйdiйes pour enrayer la dйforestation avant que celle-ci ne devienne effective [28].

Le projet Madeira, du nom du fleuve devant faire l’objet d’amйnagements, a pour but de favoriser le dйveloppement йconomique du Brйsil, de la Bolivie et du Pйrou, en facilitant la navigation et en produisant de l’йlectricitй pour le Brйsil. Prйsentй en dйcembre 2003 par l’entreprise brйsilienne Furnas Centrais Electricas. le projet consiste а noyer les cataractes et les rapides du secteur moyen du Madeira, obstacles а la navigation continue. Par ailleurs, deux centrales hydroйlectriques seraient intйgrйes au projet. l’une а Santo Antonio, en aval, et l’autre а Jirau, en amont, toutes deux en territoire brйsilien. Le coыt de l’amйnagement est estimй а 7,5 milliards de dollars US [29]. soit 5,7 milliards de dollars pour la construction des deux barrages, 1,6 milliard pour la ligne haute tension de raccord au rйseau brйsilien au niveau de la ville de Cuiabб, et 200 millions de dollars pour les deux йcluses correspondant aux deux barrages. Avec un tel prix de revient et les productions йlectriques envisagйes, le prix d’un kwh « Madeira » s’йtablit а 0,02 $, contre 0,07 $ pour un kwh type « pйtrole » [30].

Ce projet constitue йgalement un enjeu important au plan gйopolitique. En effet, c’est potentiellement 4000 nouveaux kilomиtres de voie navigable reliйs au rйseau de l’Amazone en territoire brйsilien, pйruvien et bolivien. Pour la Bolivie ce projet est capital en l’absence actuelle de sortie fluvio-maritime, ce qui pйnalise la compйtitivitй de ses produits. Cependant, pour rendre le Madeira totalement navigable, un troisiиme barrage, dont la construction se heurte encore а des obstacles lйgislatifs internes а la Bolivie, sera nйcessaire а la frontiиre boliviano-brйsilienne. Pour le Brйsil, l’importance de ce projet est йgalement de portйe stratйgique car il permettrait d’amйliorer le dйbouchй vers le Pacifique dans des proportions considйrables. Ainsi, il faciliterait l’export des excйdents agricoles de l’Etat de Rondфnia et du nord du Mato Grosso vers l’Amazone, premiиre йtape avant l’export. Le flux annuel sur le Rio Madeira est estimй а 35 millions de tonnes. Le Brйsil envisage d’ailleurs le dйveloppement d’infrastructures portuaires а Itacoatiara, au confluent de l’Amazone et du Madeira, qui prendraient le nom de Puerto Bolivбr. Ces facilitйs s’inscriraient dans un schйma de transport fluvial entre le Brйsil, la Bolivie, la Colombie, l’Equateur et le Pйrou. Par ailleurs, les minerais pondйreux brйsiliens (fer, manganиse et bauxite) trouveraient йgalement un dйbouchй naturel, via le Pйrou, vers les clients « montants » d’extrкme-orient (Chine, Corйe, Japon, etc.). Il convient enfin de prйciser, dans une perspective gйopolitique, que le projet Madeira ne constitue qu’un maillon de l’axe Pйrou-Brйsil-Bolivie de l’initiative majeure d’Intйgration de l’Infrastructure Rйgionale Sud-Amйricaine (IIRSA) [31]. lui-mкme partie du projet d’hidrovнa Orйnoque-Amazone-Plata visant а relier le delta de l’Orйnoque (Venezuela), au rйseau Amazonien, puis а l’hidrovнa Paranб-Paraguay (voir § 134), englobant ainsi toute l’Amйrique du Sud а l’exception du Chili.

La situation de fort stress hydrique dans le Nordeste est а l’origine de diffйrentes initiatives visant, d’une part, а valoriser les rйserves existant localement et, d’autre part, d’acheminer dans les zones les plus dйfavorisйes un volume d’eau plus important.

Le projet sur les eaux souterraines dans le Nord-est du Brйsil (PROASNE) est un programme de transfert de technologie financй par l’Agence canadienne de dйveloppement international (ACDI) qui vise а favoriser l’approvisionnement en eau а partir des ressources souterraines locales. En effet, les roches dures et impermйables rencontrйes dans le Nordeste (socle prйcambrien cristallin) [32] rendent les rйserves souterraines peu abondantes et difficiles а localiser. Mais de multiples difficultйs contribuent par ailleurs а rendre la situation difficile pour les populations. Ainsi les pluies sont localement faibles et les taux d’йvaporation sont trиs йlevйs. Les eaux de surface, qui sont gйnйralement polluйes (la population est trиs peu sensibilisйe aux problиmes d’йcologie) et saumвtres, ne sont consommables qu’aprиs traitement, or l’approvisionnement йnergйtique nйcessaire au transport et au pompage de l’eau est insuffisant. Par le biais du PROASNE, des technologies modernes sont fournies а trois Etats du Nordeste afin de promouvoir un dйveloppement soutenable des ressources existantes. De bons rйsultats ont d’ores et dйjа йtй obtenus grвce а une action combinant un renforcement des capacitйs institutionnelles, un volet йducatif et de dйveloppement communautaire et un programme technique. Ce dernier dйcline plusieurs moyens. cartographie de la distribution des eaux souterraines par gйophysique aйroportйe, йtablissement d’une base de donnйes sur les rйserves, ou encore technologie solaire de traitement de l’eau saumвtre. Modиle de coopйration internationale, ce projet ne permet cependant pas а lui seul de compenser le dйficit structurel en eau du Nordeste. Un apport extйrieur s’avиre nйcessaire.

L’idйe de ce chantier gigantesque n’est pas nouvelle mais suscite d’importantes polйmiques. Dйjа, au XIXиme siиcle, l’empereur Dom Pedro II avait vu dans cette entreprise le moyen de compenser les sйcheresses dйsastreuses qui touchaient la rйgion. Cependant, faute de ressources financiиres et de compйtences techniques, le projet n’avait pas vu le jour. En 1943, sous la prйsidence de Getъlio Vargas, puis en 1994, le projet йtait revenu dans le dйbat public.

Techniquement, le chantier consiste а dйtourner un dйbit maximal de 127 m 3 /seconde en йlevant l’eau а une altitude de 160 mиtres au-dessus du niveau de captation pour atteindre les bassins rйcepteurs (qui se trouvent dans quatre Etats. Cearб, Pernambouc, Paraнba et Rio Grande do Norte). Deux canaux achemineraient l’eau sur 2000 km jusqu’aux cours d’eau intermittents des zones semi-arides du Sertгo. Le pompage n’aurait pas vocation а la continuitй, sa mise en њuvre correspondant aux phases de dйficit hydrique. La moyenne des quantitйs pompйes s’йtablirait alors а plus d’un milliard et demi de tonnes annuellement, soit environ 50 m 3 /seconde [33].

Les polйmiques sur ce projet vont bon train sur fond de clivages politiques. Initialement soutenu par Fernando Henrique Cardoso, rival politique de Luiz Inбcio Lula da Silva, le projet a finalement йtй repris par ce dernier, au grand dam des opposants traditionnels. Ceux-ci dйnoncent un projet qui leur paraоt en fait destinй aux latifundistes, cultivant fruits tropicaux et coton dans une optique d’exportation, et non aux populations en difficultй, contournйes ou non desservies par les canaux qui seraient construits. Et mкme en supposant que le « capital » ne soit pas le bйnйficiaire des travaux, certains soulignent l’йtat de « souffrance » du Sгo Francisco (captages d’irrigation, barrages, dйforestation des berges et йrosion, pollution, faune menacйe) d’aprиs eux incompatible avec un tel projet. Leader de cette opposition, l’йvкque Cбpio (grкviste de la faim pendant 11 jours en septembre/octobre 2005 а ce sujet) a illustrй cette approche dans un article du quotidien A Tarde de Salvador (Bahia) en dйclarant. « Comment une personne anйmique pourrait-elle donner du sang а des malades. ».

Les contestations relatives au rapport sur les consйquences environnementales et au processus de consultation publique n’ont en tout йtat de cause pas dissuadй le gouvernement en place, qui a validй le projet en dйbut d’annйe 2007. Malgrй les polйmiques, cette entreprise n’en demeure pas moins une parfaite illustration des ambitions des autoritйs brйsiliennes quant а la valorisation du potentiel hydrique du pays.

Au-delа des rйalisations techniques ambitieuses envisagйes, le gouvernement brйsilien s’est йgalement engagй dans la dйmarche de rationalisation et de valorisation de la ressource hydrique а la faveur d’une rйforme structurelle des organes de gestion par voie lйgislative.

Conscient des difficultйs rencontrйes dans la gestion de la ressource, le gouvernement fйdйral a entrepris le « dйpoussiйrage » d’un droit de l’eau trиs sectorisй et soumis а de multiples tutelles ministйrielles. Cet effort de rationalisation a dйbouchй sur la mise en place d’une loi-cadre en 1997.

L’apparition de textes lйgaux sur l’eau au Brйsil remonte а 1934 avec la rйdaction du Code de l’eau. Exclusivement axй sur la production d’йnergie йlectrique et la garantie des intйrкts des investisseurs йtrangers, ce texte a donnй le coup d’envoi а la construction des grands amйnagements hydroйlectriques du pays. Cette situation monopolistique du secteur hydroйlectrique a perdurй pendant prиs d’une quarantaine d’annйes mais, dиs le dйbut des annйes soixante-dix, le dйveloppement socio-йcononomique du pays a rendu nйcessaire la prise ne compte des intйrкts d’autres secteurs tels que l’irrigation, la navigation, l’alimentation en eau, le traitement des affluents urbains et industriels, le secteur du tourisme et du loisir, la pкche, etc. Cette prise en compte progressive a pris des formes diverses.

-crйation, dans l’Etat de Sгo Paulo, d’une entreprise pour contrфler la pollution environnementale, particuliиrement la pollution des eaux ;

-fondation, а la mкme occasion, de l’Institut national de l’environnement (IBAMA), dont les fonctions йtaient auparavant dйtenues par un secrйtariat spйcial attachй au Gouvernement fйdйral ;

-crйation, en 1978, des comitйs exйcutifs d’йtudes intйgrйes aux bassins hydrographiques (CEEIBH) ;

-йdition de la loi sur la Politique nationale d’irrigation, en 1979 ;

-en 1981, loi n°6.938 relative а la politique nationale d’environnement ;

-rйsolution du Conseil national de l’environnement, en 1986, exigeant l’йlaboration d’йtudes d’impact environnemental pour les barrages hydroйlйctriques.

La Constitution brйsilienne de 1988 йtablit pour sa part, dans son article 21, incise XIX, qu’il revient au gouvernement fйdйral d’instituer un « systиme brйsilien de gestion de ressources en eau ». Elle dispose par ailleurs des rиgles suivantes. les lacs, les fleuves et tous les cours d’eau sur les terrains de son domaine, ainsi que ceux qui touchent plus d’un Etat, servent de frontiиre internationale ou dйbouchent en territoire йtranger ou en proviennent relиvent de la compйtence fйdйrale. Hors ces cas de figure, les eaux de surface ou souterraines, courantes, йmergentes ou mortes, sont de la compйtence des Etats, sauf dans le cas de ressources produites par des travaux de l’Union.

La Constitution йdicte de faзon trиs claire certaines rиgles de gestion, les objectifs poursuivis et plusieurs clйs de rйpartition des responsabilitйs а l’йchelle de l’Union.

-les services gouvernementaux ont l’obligation d’exiger, auprиs des diffйrents propriйtaires et entrepreneurs, des йtudes d’impact environnemental prйalables а la rйalisation d’un quelconque amйnagement ;

-l’exploitation des ressources en eau dans les territoires autochtones ne peut кtre effectuйe sans la permission du Congrиs national, aprиs avoir entendu les communautйs concernйes ;

-en matiиre de gestion des eaux, les objectifs majeurs sont la protection de l’environnement et le combat de toutes formes de pollution, l’amйlioration des conditions de l’assainissement de base, ainsi que l’inventaire et le contrфle des permis d’exploitation ;

-la gestion de l’utilisation des eaux superficielles pour la gйnйration d’йnergie йlectrique, aussi bien que pour la navigation entre deux ports brйsiliens de diffйrents Etats, est de la compйtence exclusive de l’Union. Toutes les autres utilisations des ressources hydriques peuvent кtre de la compйtence du Gouvernement fйdйral, des Etats ou des mairies des villes, en fonction des compйtences territoriales respectives.

Cependant, cette rйpartition des compйtences souffre de quelques ambiguпtйs. Ainsi, dans son article 22, la Constitution Fйdйrale йtablit qu’il appartient exclusivement а l’Union de lйgifйrer sur les eaux. En revanche, dans l’article 24, il est йtabli qu’il appartient conjointement а l’Union et aux Etats de lйgifйrer sur les forкts, la chasse, la pкche, la faune, la conservation de la nature, la dйfense du sol et des ressources naturelles, la protection de l’environnement et le contrфle de la pollution. Autrement dit, si la Constitution interdit aux Etats de lйgifйrer sur l’eau, elle les autorise а aborder cette problйmatique par le biais de thйmatiques indirectes. Cette situation est de nature а compliquer la gestion des rйserves, notamment en favorisant la redondance de certaines structures au niveau de l’Union et des Etats, avec pour consйquence des incohйrences et une dilution des responsabilitйs peu propices а l’efficience.

Afin de tenter de gommer ces difficultйs, un texte novateur, pris en application de la Constitution, s’est avйrй nйcessaire pour rйformer la politique de gestion de l’eau, en favorisant une meilleure articulation entre les organes de dйcision et en amйliorant la concertation.

La loi fйdйrale relative а la politique nationale des ressources en eau a pris le numйro 9.433/97 et a йtй promulguйe le 8 janvier 1997. Le dйlai entre la promulgation du texte et la prйsentation du projet par le gouvernement au Congrиs National en 1991 illustre les rйticences sectorielles, et singuliиrement du secteur hydroйlectrique, а voir йvoluer la gestion vers un systиme dйcentralisй, s’appuyant sur des redevances. La loi 9.433 met en place une sйrie de principes fondateurs d’une gouvernance rйnovйe et articule le dispositif de mise en њuvre autour de structures de pilotage dйconcentrйes.

La politique brйsilienne des ressources en eau, proposйe par le gouvernement fйdйral, est le rйsultat d’un travail concertй et de longue haleine entre plusieurs cйnacles, dont l’Association brйsilienne des ressources en eau (ABRH) et du Groupe de travail pour l’йtude du systиme national de ressources en eau (GT-SINGREH).

L’objectif affichй de la nouvelle politique nationale est « d’assurer en permanence l’utilisation et la conservation des ressources en eau, en tenant compte des aspects йconomiques, sociaux et environnementaux, au bйnйfice de la santй, du bien-кtre, de la sйcuritй et du dйveloppement de la sociйtй ».

A cette fin, cette politique se dйcline selon dix principes essentiels.

1. l’eau, indispensable а la vie et fondamentale а l’activitй humaine, possиde une valeur йconomique, sociale et environnementale, en raison des coыts croissants pour son obtention, pour sa protection et pour sa conservation, et ce а mesure qu’augmentent les besoins de la sociйtй ;

2. l’Union a fonction de trouver des moyens et d’agir dans les limites de ses sphиres de pouvoir (fйdйrale, des Etats et urbaine), afin d’empкcher les conflits d’utilisation, la pollution et le gaspillage des eaux superficielles et souterraines ;

3. la gestion des ressources en eau doit кtre dйcentralisйe, sans sйparer les aspects quantitatif et qualitatif, en considйrant les trois phases du cycle hydrologique (prйcipitation, infiltration et йvaporation) et en adoptant le bassin hydrographique comme scйnario de la planification ;

4. la gestion des ressources en eau doit satisfaire aux diversitйs et aux particularitйs physiques, hydrologiques, biotiques, sociales, anthropologiques, йconomiques, culturelles et politiques, rйgionales et locales ;

5. la planification et l’йlaboration des projets de travaux publics et privйs а buts multiples doivent satisfaire aux objectifs йconomiques, sociaux et environnementaux, aussi bien que gйnйrer des bйnйfices et des impacts positifs aux niveaux national, rйgional et local ;

6. les ressources en eau sont un bien public de grande valeur йconomique et leurs usages doivent dйpendre de permis et de critиres de redevances, compte tenu des aspects de quantitй et de qualitй, aussi bien que des particularitйs rйgionales et des bassins hydrographiques ;

7. le coыt des barrages а buts multiples, d’intйrкt collectif, devra кtre partagй par les usagers ou bйnйficiaires, en tenant compte des particularitйs et des niveaux socio-йconomiques rйgionaux et locaux ;

8. les municipalitйs seront indemnisйes, par le propriйtaire des amйnagements, pour les inondations entraоnйes par la construction des rйservoirs ;

9. le Brйsil prendra part а la coopйration internationale afin d’amйliorer l’usage rationnel des ressources en eau, de fortifier les liens d’amitiй, aussi bien que d’йchanger des expйriences scientifiques, technologiques, йconomiques et socio-йconomiques tout en respectant les ententes internationales ;

10. il revient au gouvernement fйdйral de revoir pйriodiquement et de modifier, lorsque nйcessaire, le Plan national des ressources en eau, qui devra кtre soumis au prйsident de la Rйpublique pour approbation.

Au-delа de cet ensemble de principes, il convient cependant de prйciser que la loi promulguйe le 8 janvier 1997 demeure une loi-cadre, qui se borne. а proclamer les fondements de la planification et de la gestion des usages de la ressource hydrique, а dйfinir les outils d’action, et а йtablir le cadre rйglementaire global du secteur.

En ce qui concerne les fondements, la planification et la gestion doivent intйgrer.

- l’unitй de la ressource en eau dans le cadre des bassins hydrographiques ;

- la conciliation des intйrкts des usagers а buts multiples ;

- l’introduction d’une dimension йconomique en traitant l’eau comme une denrйe йconomique ;

- la dйcentralisation des structures de gestion ainsi que la participation des parties prenantes dans la prise des dйcisions.

Pour leur part, les outils d’action prйvus s’articulent en six points.

Les schйmas d'amйnagement et de gestion de ressources en eau

Les schйmas d’amйnagement et de gestion sont des documents de planification, йtablis а l’йchelle du bassin hydrographique, qui fixent les orientations fondamentales, en tenant compte des milieux aquatiques (de surface et souterrains), physiques et socioйconomiques. Ces schйmas d’amйnagement ont pour but d’orienter la politique nationale de ressources en eau, йtant donnй que le Plan national de ressources en eau rйsulte de la consolidation de tous les schйmas des bassins versants.

L’octroi de permis d’utilisation pour les usagers

L’instauration de permis d’usage des ressources en eau a pour but, d’une part, d’assurer le contrфle quantitatif et qualitatif des diffйrentes utilisations et, d’autre part, de garantir а l’usager la satisfaction de ses besoins. La classification des usages soumis а permis distingue notamment. les prйlиvements d’eau destinйs а l’utilisation urbaine et industrielle (en distinguant eau de surface et eau souterraine) ; le dйversement dans les cours d’eau des йgouts et d’autres rйsidus liquides ou gazeux (avec ou sans traitements prйalables), la production d’йnergie йlectrique, ainsi que les autres usages susceptibles de modifier le rйgime, la quantitй ou la qualitй des rйserves d’eau. Les pouvoirs publics, la satisfaction des besoins des petites agglomйrations urbaines en milieu rural, ainsi que les prйlиvements et dйversements considйrйs comme insignifiants sont exonйrйs de permis.

Un systиme de redevance

La loi sur l’eau proclame la valeur йconomique de cette ressource, considйrant а la fois sa vulnйrabilitй et le fait que c’est un йlйment qui participe de la production de biens et de services. Dans ce cadre, l’йtablissement d’un systиme de redevance est conзu comme un levier а mкme de contribuer а la gestion de la demande, de rйduire le gaspillage, de redistribuer les coыts sociaux, de permettre la constitution de fonds d’intervention, et d’intйgrer а la planification globale les dimensions sociales et environnementales. Les redevances sont fonction des volumes d’eau prйlйvйs ; des volumes consommйs (c'est-а-dire la partie du volume prйlйvй qui ne retourne pas au cours d’eau) et des caractйristiques des йfluents versйs aux cours d’eau. Elles sont perзues auprиs des usagers suivants. les communautйs urbaines et rurales, les industries, les irrigants, les pisciculteurs et les autres usagers qui rйlиvent d’un permis pour l’usage de l’eau.

Une classification des cours d’eau selon leur usage prйpondйrant

Cette classification permet, notamment, d’identifier les bons interlocuteurs, privйs ou institutionnels, et d’optimiser la gestion des cours d’eau.

La mise en place d’un systиme d’information sur l’eau

Le Systиme national d’information des ressources en eau se nourrit de l’ensemble des donnйes relatives aux ressources hydriques de surface, souterraines et atmosphйriques. Les donnйes de ce systиme sont gйnйrйes par tous les organismes qui le constituent (voir § 3223). Le systиme rйpond aux principes de dйcentralisation de la collecte des informations, de coordination centralisйe du systиme [35] et de garantie d’accиs aux donnйes pour toutes les parties prenantes а l’йchelle de l’Union. Le systиme a vocation а йtablir, de faзon continue, le bilan hydrique de chaque cours d’eau, de chaque aquifиre et de chaque bassin hydrographique. Il sert par ailleurs de socle а d’autres instruments de gestion comme la classification des cours d’eau, l’йtablissement des permis aux usagers et le systиme des redevances. Il s’agit d’un outil de planification et d’amйnagement du territoire.

Une compensation financiиre aux communes

Cet instrument vise а faire compenser financiиrement par le secteur hydroйlectrique les dйsagrйments subis par les communes а la suite des inondations des barrages-reservoirs. Cette compensation est exigйe pour les amйnagements de plus de 30.000 kW de puissance nominale. Contrairement au dispositif antйrieur qui йtait moindre mais permanent, les versements prennent fin dиs lors que la compensation atteint le niveau initialement estimй des pertes йconomiques et financiиres subies. Il est а souligner que ce systиme fait dйbat entre le secteur de gestion des ressources en eau et le secteur hydroйlectrique, ce dernier estimant кtre taxй а deux reprises. une fois au titre de la redevance et une fois au titre de la compensation.

La loi n° 9.433/97 a entraоnй la crйation d’un ensemble intйgrй d’organismes -le Systиme national des ressources en eau- dйdiйs а la gestion de l’eau sur le territoire brйsilien, et dont les principaux sont.

- le Conseil national des ressources en eau (CNRH en portugais) ;

- les conseils des ressources en eau des Etats (CERH en portugais) ;

- les comitйs de bassin hydrographique ;

- les agences de l’eau.

Le Conseil national des ressources en eau

Cette structure, а la tкte du systиme national, joue un rфle fondamental dans la dйtermination de la politique suivie а l’йchelle de l’Union dans le domaine de la ressource hydrique. Ses attributions sont nombreuses et consйquentes.

- йtablir la planification en coordination avec les rйgions, les Etats et les secteurs usagers de l’eau ;

- arbitrer les conflits entre les CERH ;

- dйlibйrer des projets d’utilisation des ressources ayant une dimension interйtatique ;

- trancher les problиmes soumis par les comitйs de bassins ;

- йvaluer les propositions d’amendement de la politique nationale des ressources en eau ;

- йtablir des orientations complementaires pour la politique nationale des ressources en eau, pour la mise en њuvre de ses instruments et pour l’amйlioration des performances du Systиme national de ressources en eau ;

- approuver les crйations de comitйs de bassin hydrographique et leurs plans ;

- йlaborer des critиres gйnйraux d’octroi des permis d’usage et d’йtablissement des redevances.

Les pouvoirs du CNRH sont donc considйrables et le gouvernement fйdйral a utilisй les marges offertes par l’article 34 de la loi [36]. relatif а la constitution de cette instance, pour conserver la majoritй des voies en son sein.

Le souci de dйcentralisation exprimй par le legislateur se trouve quelque peu battu en brкche par un systиme oщ l’autonomie du CNRH est faible par rapport au gouvernement (voire au lobby hydroйlectrique sur-reprйsentй). De ce fait, sa composition et ses logiques de fonctionnement ont constamment йtй remises en question depuis sa mise en place. L’Union souhaite actuellement garder la majoritй pour deux raisons principales. d’une part, le prйsident est le responsable lйgal en dernier ressort des dйcisions prises et, d’autre part, le secteur des ressources en eau est encore en phase de constitution, ce qui demanderait « plus d’Etat ». La maturation de ce secteur pourrait, а terme, engendrer une йvolution de sa composition. Mais les rйticences sont fortes et, pour l’heure, les organisations civiles se battent sur des fronts plus modestes, tels que celui de la prise en charge des frais induits par les dйplacements en sessions des chambres techniques (CT), oщ s’effectuent l’essentiel des travaux, afin de garantir leur prйsence.

Si la rйforme de la politique de l’eau se met en place de maniиre parfois laborieuse, avec un tropisme centralisateur persistant qui s’exprime au sein du CNRH et des resistances au changement, il n’en demeure pas moins que la loi-cadre de 1997 oriente rйsolument la gouvernance de l’eau vers un mode de gestion dйcentralisй. Dans ce cadre nouveau, la gestion par bassin versant apparaоt comme une piste sйrieuse pour optimiser la ressource.

Au Brйsil, le concept de gouvernance de l’eau renvoie а l’application du principe de « participation а la formulation des politiques pour l’eau » introduit dans la loi-cadre de 1997 et dans les lois des Etats fйdйrйs. Cette innovation s’inscrit dans le cadre de la rйforme plaзant le bassin versant au centre d’un dispositif de gestion se voulant plus dйmocratique et plus fonctionnel. La loi invite les usagers а sortir d’une logique sectorielle au profit d’une gestion plus intйgrйe des ressources, а la faveur notamment de la crйation, dans le contexte du bassin, d’organismes d’inspiration franзaise. les comitйs de bassin, qui recouvrent la redevance et gиrent au plan financier, et les agences de l’eau (ou agences de bassin), qui approuvent les plans d’utilisation des ressources, administrйs par les agences. En effet, jusqu’alors, les compйtences respectives des institutions fйdйrales (cours d’eau fйdйraux), des Etats et des municipalitйs (maоtres d’ouvrage des services urbains de l’eau et de l’assainissement et responsables de l’usage des sols) rendaient peu lisible l’action d’un dispositif institutionnel dйsarticulй, dissociant presque toujours qualitй et quantitй. Dйsormais, les nouveaux organismes de bassins et les conseils de l’eau, qui associent les diffйrents acteurs, ont vocation а donner de la cohйrence а l’ensemble.

Pour autant, la mise en њuvre opйrationnelle de ce dispositif n’est pas simple, se heurtant а une certaine complexitй et а des difficultйs d’adaptation. La gestion des bassins impose en effet la cohabitation de plusieurs systиmes distincts de gestion (parfois sur des cours d’eau communs а plusieurs Etats), sans pour autant empкcher la prolifйration d’organismes de sous-bassin, et tout en exigeant la mise en place du systиme des redevances а l’Etat fйdйral et aux Etats fйdйrйs. Par ailleurs, la question des йchelles appropriйes de gestion se pose aussi pour les services publics d’eau et d’assainissement. alors que le rйgime autoritaire avait cherchй а imposer un opйrateur public unique par Etat, la dйmocratisation voit s’affronter d’autres modиles alternatifs. Remunicipalisation et privatisation sont envisagйes, mais sans que le niveau local ne dispose des capacitйs de gestion ou de contrфle suffisantes ; et, paradoxalement dans un systиme fйdйral, la crйation de syndicats intercommuaux (intermunicipais ) est contestйe par certains pour inconstitutionnalitй.

Nйanmoins, l’application de ce modиle de gestion dйcentralisйe, fruit d’un consensus bвti chez les techniciens de l’eau au Brйsil dиs les annйes 70, progresse au travers de nombreuses expйriences. C’est notamment le cas dans le sud-est humide, urbanisй et industrialisй – notamment le bassin du Paraнba do Sul – mais йgalement dans l’Etat de Sгo Paulo, avec l’agence de bassins Piracicaba-Capivari-Jundiai (qui rйunit 32 villes et agit avec le soutien de l’agence de l’eau Seine-Normandie dans le cadre d’une accord de coopйration dйcentralisйe), ou encore dans l’Etat de Bahia avec le Bassin du Rio Jiquiriзa. Par ailleurs, par souci d’йchange constructif et d’appui mutuel, certaines agences s’associent au plan national, tйmoignant ainsi de l’engouement suscitй par ce type de gestion. Ainsi, un rйseau des Consortiums (syndicats intercommunaux) et Associations intermunicipales de bassins hydrographiques a vu le jour, ainsi que le Rйseau brйsilien des organismes de bassins hydrographiques (Rede Brasil dos Organismos de Bacias Hidrograficas – REBOB), membre du Rйseau International des Organismes de Bassins (RIOB).

Ce modиle doit encore кtre validй dans les bassins couvrant une superficie trиs importante et oщ, fort logiquement, la convergence des intйrкts respectifs est encore plus difficile а obtenir. C’est ainsi le cas du bassin du fleuve Tocantins (environ 770 000 kmІ) et surtout du Sгo Francisco (environ 640 000 kmІ) oщ, dans le contexte politique trиs dйlicat dйjа йvoquй, les compйtences du comitй de bassin sont largement contestйes.

En tout йtat de cause, et malgrй les difficultйs rencontrйes et а venir, d’ailleurs souvent liйes au caractиre rйcent de la mise en place des agences de bassin ainsi qu’aux incontournables balbutiements et rйsistances au changement, il semble que la voie de la gestion dйcentralisйe des ressources en eau est la plus prometteuse. Une politique centralisйe et non-discriminйe dans un pays aussi vaste et aussi diversifiй (dans la ressource comme dans les besoins) que le Brйsil paraоt en effet relever de l’utopie. L’expйrience de pays pionniers tels que la France est de nature а profiter aux responsables brйsiliens qui, fort opportunйment, dйveloppent la coopйration internationale. La prise de conscience par le Brйsil de ses difficultйs dans la gestion de l’eau et l’ambition affichйe dans la mise en њuvre de solutions novatrices constituent en tous cas des sujets d’optimisme.

A l’йchelle de la planиte, et а l’heure oщ la possession de rйserves d’eau douce est de plus en plus perзue comme une donnйe stratйgique, le Brйsil dispose d’atouts considйrables. Grвce а ses cours d’eau nombreux et puissants, ainsi qu’а la faveur d’importantes ressources souterraines, ce pays dйtient 12% des rйserves estimйes d’eau douce dans le monde. A ce titre, le fleuve Amazone et l’aquifиre Guarani apparaissent particuliиrement emblйmatiques des fantastiques capacitйs hydriques mises а la disposition du Brйsil par la nature. Conscient de ses atouts, le Brйsil s’est largement appuyй pour son dйveloppement sur ces ressources а la fois abondantes, facilement accessibles et, de fait, peu onйreuses. Ainsi, l’eau a notamment pris une part extrиmement importante dans le dйveloppement de la production agricole et agro-industrielle, point fort de l’йconomie brйsilienne, ainsi que dans la production йnergйtique, а plus de 92% d’origine hydraulique.

Mais au-delа de ce premier constat, et c’est lа tout le paradoxe de la situation brйsilienne, une analyse un peu plus poussйe montre que la ressource hydrique du pays prйsente de nombreuses faiblesses. Enfant gвtй par la nature, le Brйsil constate aujourd’hui l’ampleur des erreurs commises. gaspillage, sur-exploitation et surtout pollution. De fait, outre une rйpartition territoriale parfois inйgalitaire des rйserves, l’interdйpendance qui s’est progressivement йtablie entre l’eau, d’une part, et la population et l’ensemble de l’йconomie du Brйsil, d’autre part, donne toute sa dimension а une menace йcologique dйsormais prйgnante. Constituant un nouvel enjeu de survie, de pouvoir et de profit, l’eau est а la fois une source de querelles entre les usagers et l’objet de la convoitise d’industriels spйcialisйs, voire de pays йtrangers, donnant а la ressource hydrique toute sa rйsonance gйopolitique.

Affichant leur volontй de relever le dйfi d’une meilleure gouvernance de l’eau, les autoritйs brйsiliennes se sont engagйes dans une dйmarche volontaire en jouant sur plusieurs leviers. Ainsi, souhaitant s’inscrire dans un processus d’exploitation durable, le gouvernement cherche tout d’abord а protйger la ressource tout en la valorisant dans ses modes de distribution et dans ses potentialitйs йconomiques. Par ailleurs, l’accent a йtй mis sur une nouvelle politique nationale de gestion dont l’objectif dйclarй est « d’assurer en permanence l’utilisation et la conservation des ressources en eau, en tenant compte des aspects йconomiques, sociaux et environnementaux, au bйnйfice de la santй, du bien-кtre, de la sйcuritй et du dйveloppement de la sociйtй ». A cet effet, un cadre lйgislatif a йtй йtabli afin, notamment, de promouvoir une gestion dйconcentrйe articulйe autour des bassins versants, s’inspirant en cela de l’expйrience franзaise. Bien que se heurtant а certaines rйsistances au changement et aux traditionnelles difficultйs de mise en place, cette voie de la gestion dйcentralisйe des ressources en eau semble la plus adaptйe а un pays aussi vaste et diversifiй que le Brйsil. Le rodage nйcessaire des jeunes agences de bassins devrait, а terme et avec l’appui de structures internationales expйrimentйes, donner des rйsultats satisfaisants, а la faveur d’une concertation renforcйe et d’une meilleure synergie des diffйrents acteurs.

Enfin, il convient de remettre en perspective la situation du Brйsil dans la problйmatique internationale de « l’or bleu ». Force est de constater que ce pays, malgrй sa situation privilйgiйe, n’йchappe pas а la question de l’accиs а l’eau. et а l’ardente nйcessitй de tout Etat d’assurer la satisfaction des besoins hydriques de ses citoyens. Comprendre la nйcessitй d’une gestion pйrenne de l’eau, c’est comprendre sa vulnйrabilitй et la nйcessitй d’assurer la prйservation d’un intйrкt vital, et ce quel que soit le capital dont on dispose initialement. Au regard des besoins croissants qui semblent se dessiner а l’йchelle de l’humanitй, il est loisible de s’interroger sur l’йventuelle sortie d’une gestion nationale de l’eau. La considйrer comme un droit fondamental, qui ne saurait кtre un enjeu de marchй ou la propriйtй des Etats, est la solution prйconisйe par certains. A quand une Agence mondiale de l’eau, aux pouvoirs supranationaux.

Chef d'escadron Frйdйric Boudier, gendarmerie nationale, France, 14e promotion du CID.

Manuscrit clos en mars 2007

Notes de l'йtude

[1] FREMY Dominique et Michиle et al. QUID 2005, Paris, Robert Laffont, 2004, pp. 1144-1145.

THERY, Hervй et MELLO DE, Neli Aparacida, Atlas du Brйsil. CNRS-GDR Libergйo, Paris, La Documentation franзaise, 2004.

FREMY Dominique et Michиle et al. QUID 2005, Paris, Robert Laffont, 2004, 2190 p.

SIRONNEAU Jacques, L’eau nouvel enjeu stratйgique mondial. Paris, Economica, coll. Poche gйopolitique, 1996, 111 p.

ARTICLE DE REVUES

B ERTRAND Jean-Pierre, W ANIEZ Philippe, B RUSTLEIN Violette (2001). «Les facteurs territoriaux de la compйtitivitй de la filiиre soja au Brйsil», Olйagineux, Corps Gras, Lipides. n°8, vol. 3, p. 223-229.

JOHNSSON, Rosa Maria Formiga (2001). « La nouvelle politique de l’eau au Brйsil. force et enjeux d’une transformation vers une gestion intйgrйe », Revue Tiers monde. n°166, PUF, p. 403-425.

MARQUES Eduardo (2004). « Situation et perspectives du secteur hydroйlectrique au Brйsil », Sйminaire universitй paris-Dauphine. PARIS.

MEUBLAT, Guy et Philippe LE LOURD (2001). « Les agences de bassin. un modиle franзais de dйcentralisation pour les pays йmergents. », Revue Tiers monde. n°166, PUF, p. 4375-402.

P ASQUIS Richard (1999). «Dйforestation en Amazonie et son impact sur l'environnement». Bois et forкts des tropiques. n° 260, Montpellier: Cirad-forкt, p. 53-64

Spйcial pays йmergents, Antoine Chazal, 25 aoыt 2006.
www.boursorama.com

Sur la surveillance satellitaire de l’Amazonie :
Monitoremento da floresta brasileira por satйlite, PRODES, 2003.
http://www.obt.inpe.br/prodes

Sur les barrages :
http://www.dams.org/news_events/press316.htm.

Sur les enjeux de la triple frontiиre :
Elsa M. Bruzzone, « Bataille pour l’or bleu а la triple frontiиre », Rйseau d’information et de solidaritй avec l’Amйrique latine (RISAL), 7 janvier 2004.
Hinde Pomeraniec, « L’eau convoitйe de l’aquifиre Guarani », Rйseau d’information et de solidaritй avec l’Amйrique latine (RISAL), 26 dйcembre 2005.
http://eau.apinc.org

Sur les phйnomиnes de sйcheresse touchant l’Amazone :
www.lemonde.fr, Christiane Galus, 21 octobre 2005.
www.acme-eau.org. Jean-Luc Touly, 14 octobre 2005

Sur les prйlиvements industriels d’eau :
www.unep.org/org/org3/french/294.htm

Sur les questions de pollution :
SUASSUNA Joao, Agкncia Carta Maior, 9 avril 2004
www.autresbresils.net

Sur les questions gйnйrales et les projets d’amйnagements des cours d’eau :
www.wikipedia.org